attachement de St Amand à « son » régiment

le 1er R.I. stationné à Cambrai (Nord) était en première ligne pour affronter l’offensive allemande du 10 mai 1940.

Après avoir vaillamment défendu Lille et Dunkerque les rescapés se sont retrouvés dans le sud de la France.

Le 25 juin, Hitler fixe les conditions d’une armistice :

– 1 – Alsace-Lorraine annexée

– 2 – Ardennes (avec son minerai), Nord (avec sa houille) rattachés à la Belgique gouvernée par un gauleiter.

– le reste de la France partagé en 2 zones : 2/3 occupés et 1/3 dit libre.

ST AMAND MONTROND est en zone libre.

– 3 – Hitler autorise dans cette zone libre une armée de 100.000 hommes en maintien de l’ordre.

Le 1er R.I. sera réparti sur St Amand Montrond, Dun-sur-Auron et Issoudun.

L’arrivée de ces militaires (sonnés par la défaite, originaires du Nord, d’Alsace, sans nouvelle de leur famille) à St Amand Montrond qui n’a jamais été ville de garnison, va rencontrer beaucoup de compréhension.

Les officiers et sous officiers seront logés chez l’habitant, la troupe dans les annexes des hôtels restaurants, bâtiments industriels, etc.. en attendant la construction de baraquements :

– le camp T 1 qui deviendra la base du Lycée Jean Guéhenno

– le camp T 2 an nord du stade Gesset

Des mariages vont se concrétiser dans le boischaut.

Des jeunes berrichons vont s’engager

Des 1er R.I. vont nous sortir des joueurs de foot de talent qui vont nous renforcer.

La musique va faire son apparition, du classique avec le Lieutenant DALENNE qui deviendra commandant de la compagnie de la C.H.R. (Compagnie Hors Rangs), et un accordéoniste animera les soirées de bienfaisance.

NOVEMBRE 1942

Le 1er Régiment d’Infanterie est aux ordres du Colonel BERTRAND (alias Benoît dans la résistance)

Le vent souffle, maussade, balayant le Berry. A St Amand Montrond, dans la cour du camp T 2, le 3ème bataillon du 1er R.I. est rangé l’arme au pied. Au milieu une place vide, celle du drapeau. Dès que la menace s’est précisée, il a été mis en sécurité. Le Colonel commandant le régiment arrive, le commandant Rauscher fait présenter les armes et le salue dans un grand silence chargé de tension. Au moment où celui-ci devient intolérable, la musique le déchire : l’ultime coup de panache avant les larmes, la Marseillaise

La dernière Marseillaise sous l’uniforme, puis le refrain du régiment, plus brillant encore puisque c’est l’agonie.  Le chef admire ce bataillon. Il le passe en revue, mais c’est plutôt pour voir encore ces visages de soldat. Tous ont les yeux humides. Alors sont adjoint, dont les mains tremblent, lit l’ordre du jour 86 :

« Pour la première fois, après quatre siècles d’existence, sous le coup d’un sort injuste et indépendant de la fortune de ses armes, le Premier de Ligne doit cesser d’exister. Officiers, sous-officiers, caporaux et soldats qui aviez juré de servir jusqu’au bout sous un drapeau entre tous chargé de gloire, le Colonel partage votre émotion et votre amertume.

Il s’incline devant ses plis.

Autour de lui nous nous rallierons tous au jour de la résurrection que nous savons certain.

Quoi qu’il arrive, restez fidèles au Premier

et vive la France. »

Saint Amand Montrond, le 28 novembre 1942

Dans la nuit du 27 au 28 novembre, sentant venir le danger, le Colonel avait réuni tous les cadres supérieurs, fixé la ligne à suivre pour entrer dans la clandestinité, défini les moyens immédiats de camoufler équipements, armes, vivres et habillement, en prévision de la lutte future.

Cependant, l’essentiel était de sauver l’esprit de corps.

Du contact fréquent entre cadres et troupes dépendait la foi, base de toute action à venir.

A tous ceux qui peuvent rester sur place, on va fournir des emplois, de l’argent, des possibilités de logement et d’alimentation dans l’attente de jours meilleurs. Des places, le colonel en trouve par ses relations. Voici le commandant Rauscher sous la couverture du directeur départemental de la défense passive du Cher. Refusant une situation civile particulièrement brillante, il s’enterre dans cette petite ville du Berry, et apporte à sa Patrie toutes ses qualités d’homme d’action et toute son admirable foi de soldat et d’Alsacien. Que ce soit dans les bourgs ou dans les fermes, tous les hommes du 1er R.I. sont bientôt casés. Des coopératives charbonnières, forestières, agricoles sont créées avec l’aide d’industriels et d’agriculteurs ; ce sont autant de cellules  vivantes du régiment.

Quant à ceux qui rejoignent le Nord, leur pays d’origine, des chefs clandestins partent avec eux qui garderont la liaison avec le cœur du régiment.

L’ennemi assurant un contrôle très strict de l’armement et du matériel reversé, contrôle d’autant plus facile qu’il en possède la situation exacte, il faut jouer avec lui. On maquille les états, on détourne les contrôleurs de leur mission.

L’opération est conduite avec audace par un officie et deux sous-officiers parlant parfaitement l’allemand. Les résultats dépasseront les espérances ; trente deux fusils mitrailleurs, plus de cent pistolets, douze mitrailleuses sont ainsi détournés du contrôle et placés dans des cachettes sûres. Plus de deux mille collections d’effets et de chaussures, trois mois de vivres de réserves, les instruments de musique, les appareils de transmissions, les bicyclettes, les autos disparaissent en une nuit.

Les fermes des environs, les caves des villes, les greniers, les jardins, les souterrains absorbent tout avec un maximum de rapidité ». On camoufle, on enterre, on cache… et le Boche ne voit rien.

Et le Drapeau, où est donc le Drapeau ?

Il a disparu le  premier, chez M. Leroy, un sculpteur saint-amandois. Il va faire le maquis avec nous. Quand le séjour de la ville deviendra intenable, il sera dans le grenier d’un paysan, M.Gibaud, dissimulé par une boîte de fer d’aspect inoffensif.

Plusieurs fois, Vichy le demandera au Colonel : « Il est à ma charge, personne mieux que moi ne saurait le garder. ».